Dom La Nena chante pour le coeur

ELA – Premier album (Six Degrees records)

« A force de voyager entre deux mondes, on finit un jour par créer le sien »   

Frank ANSELL, guérisseur Aborigène (Nungkari)

Dom-La-Nena

Son premier album ELA vient d’arriver en France, bordé d’un accueil élogieux et de critiques qui se succèdent à un rythme impressionnant. Voyez donc ici.

Par la vertu des rencontres et suite à quelques compagnonnages heureux, la violoncelliste Dominique PINTO s’éveille au pays du chant intérieur et laisse éclore DOM LA NENA, une belle personne-artiste tout en harmonies.  Apparemment, ça la transporte. Bonne nouvelle: c’est contagieux!

Il y a quelques semaines, incapable de trouver ELA dans les bacs de la FNAC, vous auriez sollicité l’aide d’un responsable de rayon et il vous aurait demandé: « DOM LA NENA? Quel genre de musique? »  Vous auriez sans doute été bien en peine de répondre…  Car entre Brésil, Argentine, Portugal, Paris, sans oublier le tentaculaire pays des aéroports où les musiciens passent beaucoup de temps, comment en effet catégoriser une artiste infusée d’autant de cultures musicales que d’étapes dans sa vie?  Les contingences bien explicables du métier de disquaire offrent facilement le prétexte à rebondir sur la question de l’identité de DOM LA NENA et de la genèse de son acte de naissance: ELA.

Pas honteux de notre manque d’érudition dans la musique de genre, à La Maison Jaune on est (peut-être) comme vous: convertis par la beauté d’une œuvre, et d’autant plus curieux des motifs de cette adhésion.

Un premier réconfort, tout d’abord, dans cette nouvelle démonstration que la musique n’en finit pas – n’en finira jamais – de vivre au travers des combinaisons infinies de son dialogue avec la vie et l’histoire des gens: ceux qui la chantent; ceux qui inspirent ceux qui la chantent.  Rien de cadré, rien de tracé à l’avance pour DOM, qui aurait pu à chaque étape investir un schéma connu: violoncelliste classique ou musicien d’accompagnement pour les projets d’album et les tournées d’artistes-phares.

Dom by J

On ne sait – du besoin d’émancipation ou de l’urgence d’exprimer – ce qui accouche un beau jour de DOM LA NENA?  Ce qui est probable en revanche, c’est que le terreau fertile devait être prêt, lente maturation des expériences, des enrichissements, des émotions fixées tout au long de la route.  Sans avoir cherché à cultiver dans une quelconque visée stratégique une virtuosité d’instrumentiste ou un folklorisme exotique, DOM semble avoir au contraire laissé affleurer toutes les sources de son patrimoine agrégé.  Sa décision la plus inattendue est alors de considérer qu’elle peut commencer à écrire: la plume saura d’elle-même dans quelle encre tremper, car c’est bien souvent dans l’écoute intime, l’abandon des prétentions complexes – sans pour autant méconnaître ses talents – que naît l’identité durable d’un artiste complet.

Gage de cette maturité et d’une harmonie réussie, « chacun reconnaîtra les siens » pourrait-on dire.  Phrases et toucher du violoncelle désormais indissociables des projets récents de CAMILLE, Jane BIRKIN, Piers FACCINI, Etienne DAHO ou encore Rose-marie STANDLEY.  Voix chorales et douces des univers latino-américains de sa jeunesse, qui replongent illico dans la douceur des conversations musicales entre le poète chantant Vinicious DE MORAES et TOQUINHO.  En un mot, de belles chansons – tout le monde comprend ce qu’est une « belle chanson »: limpide, universelle,  et tout autant intime.  Des témoignages forts qui n’occultent en rien l’invention présente dans chaque chanson de DOM.

Si l’intention créatrice est là et bien là, il n’est pas rare, dans le cas d’un premier album, qu’elle soit détournée ou surchargée pour servir un improbable « coup de production ».  Ici encore: bonne pioche! Le choix de coproduire l’album avec l’auteur-compositeur Piers FACCINI ne pouvait mieux convenir.  Engagé dans un mouvement semblable avec sa propre production, Piers a mis tout le soin qu’on lui connaît à servir avec intégrité une impulsion créatrice personnelle et l’habiller sans excès de fards ni de rubans pour sa sortie dans le monde.  Home-studio dans les Cévennes, balades en montagne pour décanter les idées, tablées familiales après le boulot, sans oublier la touche magique de l’ingénieur du son Patrick JAUNEAUD au mixage, … DOM LA NENA avait toute la palette à disposition et elle n’a rien gâché.  Ajoutons-y, pour les photos et les clips, l’œil inspiré de Jeremiah – réalisateur entre autres du film « A NEW MORNING » avec Piers Faccini, et vecteur de bien des rapprochements heureux entre artistes musiciens.  Cet exhausteur de goût 100% naturel a le don pour détecter dans le cadre le moins élaboré l’élément visuel qui symbolise le mieux l’artiste ou le geste artistique à l’œuvre.  Suivez ce garçon.

Au final, on se retrouve toujours avec la même question: pourquoi certaines chansons nous touchent tant?  Pas fabriquées comme un tube de l’été, pas une musique à danser, ni manifeste militant, ni lamento-explicite-garanti-vécu.  Et pourtant elles ne nous quittent plus.  Là-dessus, il n’y aura jamais que des hypothèses.  Celle-ci, par exemple, qui verrait dans ces chansons le véhicule de nos émotions, de nos souvenirs, de nos espoirs diffus.  Une proposition sensorielle qui ferait écho à ce que chacun de nous trimballe, de lourd ou de léger, dans l’imaginaire que fabrique l’esprit.  Un petit bout d’histoire qui rattraperait la nôtre et la guiderait de l’esprit vers le cœur, là où l’on vit pour de vrai.

On entre dans cet album comme dans une maison familière. Familiale. On y reconnaît les sons qui nous accompagnent, qui racontent l’heure de la journée, le temps qu’il fait, la vie qui s’écoule ; on reconnaît les ombres portées sur la table, qui dessinent un corps aux instants du jour.

Des bruits de pas sur un plancher, qui en a porté d’autres que nous, et qui raconte leurs passages, comme une invitation à mettre, nous aussi, un pied devant l’autre et à suivre le chemin du vent.

De petites clochettes venues tinter là-bas derrière, loin, très loin, happant notre regard (écoute), ouvrent l’espace, qui devient soudain vaste, si vaste que nous sommes plongés au cœur du cosmos, à toucher les étoiles du doigt … Le chant des oiseaux se chargera de nous rappeler sur terre, où l’on s’éveillera, bercés par le vent-violoncelle, comme dans un hamac suspendu aux branches d’un chêne séculaire. A moins que nous soyons ce chêne …

Cet album, vraiment, mérite l’écoute au casque : pour profiter de ces délices si finement ciselés, des interpellations instrumentales, de ces voix qui nous traversent, nous habitent… ; pour se laisser aller au délice de rester en suspension entre deux passages, entre deux morceaux de vie, lorsqu’une chanson se termine et qu’on attend la prochaine pour réapprendre – doucement – à respirer, tout entiers enveloppés de cette douceur palpable que Dom La Nena sait communiquer aux chansons ; pour jouir de cette belle proximité déjà aimée, louée sur les albums de Piers Faccini ; de ces ambiances qui nous font ressentir la musique comme vivante, charnelle, pleine et porteuse des bruits du monde … Vraie.

[Lisa    Ideïous]

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Pour aller plus loin:

Une merveille de petite médiathèque: le site officiel de DOM LA NENA 

DOM LA NENA se déguste en concert – dont celui-ci (clic!), qui promet! – car c’est là que la musique palpite!
(pour les autres dates cliquez sur le lien du site et naviguez jusqu’à la rubrique TOURNEE)

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Une porte vers Jeremiah

… et Piers Faccini:  le nouveau channel Youtube avec des videos de Jeremiah ET un duo avec Dom

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